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Hommage à René Vautier,

humaniste résolu et cinéaste-citoyen du Tiers-Monde

 

par Franck Michel

 « Le cinéma est un moyen de répondre à des gens disant des choses fausses

par des choses que l'on estime plus justes ! »

René Vautier

René Vautier (D.R.)

Avec le massacre terroriste – et ses suites quasi-immédiates – survenu à Paris le 7 janvier 2015 au siège de Charlie Hebdo, il y a, sans surprise devant l’émotion du moment, des nouvelles qui sont devenues soudainement secondaires. Parmi celles-ci il y a la mort, le 4 janvier dernier, de René Vautier, un cinéaste courageux et un militant infatigable qui n’a jamais rien renié ni lâché. 

 

Sa principal œuvre est certainement « Avoir 20 ans dans les Aurès », un film-documentaire incontournable – qui en 1972 avait bousculé les bonnes consciences au festival de Cannes avant d’obtenir le prix de la Critique internationale – mettant en scène une Algérie en guerre avec des soldats « appelés » de métropole parfois transformés en criminels d’une vraie guerre qui refuse obstinément de dire son nom. Mais, en dépit de la pression et de l’oppression, un cinéaste engagé sort enfin du bois et monte par la force des choses et des images sur la scène médiatique… cela même s’il avait réalisé nombre d’autre films-documentaire – notamment sur l’Afrique colonisée puis décolonisée – depuis l’année 1950.

 

Farouche militant anticolonialiste, René Vautier s’engagera tout au long de sa vie du côté des opprimés de ce qu’on appelait jadis le Tiers-Monde, et aujourd’hui les pays en développement (ou plutôt en proie au développement)… Après s’être fait passé pour mort à la fin des années cinquante (après sa traque orchestrée par les militaires français sur le sol encore « franco-algérien », suite à la sortie de son film pro-indépendantiste « Algérie en flammes » en 1958), il se planque un peu partout au Maghreb et formera plus tard les premiers cinéastes algériens et tunisiens. 

 

Résistant de toujours, il leur apprendra le maniement des caméras comme pour mieux poursuivre – et mieux que par les armes – la guerre de libération par la voie des images. En 1973, après une grève de la faim d’un mois, il parvient à force de grande conviction à faire avancer fortement et utilement la nécessaire lutte pour la fin de la censure politique en France.

 

Au moment où le fanatisme et l’obscurantisme dépassent toutes les bornes, y compris en France même – l’attentat le plus meurtrier perpétré sur le sol français, avant celui contre Charlie Hebdo en janvier 2015, était dû à l’infâme OAS dans l’attentat dit du train Paris-Strasbourg le 18 juin 1961 – se souvenir de René Vautier est aussi un constant appel à la résistance et à l’action contre toutes les injustices et toutes les discriminations. Toutes les répressions aussi. 

 

Profondément engagé contre le colonialisme, René Vautier n’a cessé de batailler en même temps contre toutes les formes de censure. Le fanatisme religieux, conduisant au terrorisme, a remplacé le colonialisme. Mais le combat reste le même. Nous sommes tous des Charlie ? Oui et tant mieux. Nous sommes tous aussi des Vautier. Contre tous les vautours et tous les extrémistes qui entravent nos vies et notre libre pensée.

 

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